Pour repenser l’aide juridique

Synthèse du Rapport de recherche L’accès des femmes à l’aide juridique en matière matrimoniale sur le territoire de la Montérégie. L’expérience des femmes, le point de vue des avocats (№ ISBN 2-9807657-0-8), rédigé par Nathalie Riopel.

Rédaction, contact : Brigitte Verdière

                            Chargée de projet

Inform’Elle

3757, Mackay, Saint-Hubert, Québec, J4T 2P6

Tel : (450) 443-3442

droitpourelle@informelle.osbl.ca


Pour repenser l'aide juridique 


En avril 2002, Inform’Elle a publié une étude sur L’accès des femmes à l’aide juridique en matière matrimoniale sur le territoire de la Montérégie. Réalisée par Nathalie Riopel, l’étude se base sur une batterie d’entretiens avec des femmes ayant recouru à l’aide juridique, et avec des avocates et des avocats exerçant dans ce cadre, cette étude avait pour but de déterminer l’adéquation du système aux besoins des femmes. Au Québec aucune étude ne s’était jusqu’à présent intéressée à ce sujet. C’est une synthèse de cette recherche que nous vous présentons dans le document ci-joint.

Même s’il n’existe pas de statistiques sexo-spécifiques sur le recours à l’aide juridique, l’on sait, par la pratique, que les femmes y font plus appel que les hommes. En effet, indique Statistique Canada, les femmes disposent de revenus inférieurs de quelque 27 % à ceux perçus par les hommes. Elles constituent 56 % des Canadiennes et des Canadiens à faible revenu. Les femmes, occupent plus massivement des emplois à temps partiel, à durée déterminée, sur appel, etc. Quand elles sont seules, particulièrement avec des enfants à charge, leur situation s’aggrave. Toujours selon Statistique Canada, 56 % des mères seules vivent avec un montant inférieur aux seuils de faible revenu.

Les données recueillies par les bénévoles d’Inform’Elle confirment ce profil. Les « clientes types » de l’aide juridique sont âgées de 30 à 50 ans. Elles ont généralement des enfants à charge, ont un niveau scolaire qui ne dépasse pas le secondaire V et disposent de revenus annuels tournant autour des 10 000 $ à 12 000 $, provenant souvent de l’assistance emploi. Une séparation ou un divorce entraîne une chute importante de leur niveau de vie.

Elles recourent à l’aide juridique essentiellement pour des questions de droit matrimonial : divorce, pension alimentaire, garde des enfants, droits d’accès...

Plusieurs ont connu la violence conjugale et ont un déficit important en information sur leurs droits. Leurs besoins ne sont toutefois pas que juridiques : ils sont psychologiques, matériels, reliés à la santé.

 Inform’Elle est un organisme sans but lucratif qui offre des services d’information juridique en droit de la famille via une permanence téléphonique, des ateliers, des conférences et des cours d’auto-divorce et d’auto-procédure en pension alimentaire. L’organisme propose également des services de médiation familiale. Son but est de promouvoir l’autonomie et l’égalité des femmes et de sensibiliser les milieux juridiques aux réalités féminines. Inform’Elle fête ses 25 ans d’existence en 2003.

Cadre de l'étude 


La recherche L’accès des femmes à l’aide juridique en matière matrimoniale sur le territoire de la Montérégie qualitative et régionale. Elle se base sur 20 entretiens avec des femmes rencontrées individuellement et en groupe, et sur 7 rencontres avec des avocates et des avocats exerçant, soit dans des bureaux de l’aide juridique, à titre de salariées et de salariés du gouvernement, soit dans la pratique privée, à mandat.

Les femmes interrogées ont une moyenne de 42 ans. La plupart sont québécoises, mariées avec des enfants à charge. Elles ont recouru à l’aide juridique essentiellement pour des demandes en divorce, avec requête pour garde d’enfant et pension alimentaire pour les enfants, pour elles-mêmes, et des droits d’accès. Toutes ces requêtes avaient été contestées par leur ex-conjoint. Elles étaient majoritairement suivies par une professionnelle ou un professionnel du privé. Un tiers avait déjà fait appel à l’aide juridique précédemment. La moitié a eu recours aux services des maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence où l’auteure de l’étude les a rencontrées.

La situation des Montérégiennes est similaire à celle observée au niveau de la province, même si le salaire annuel moyen est un peu supérieur à celui d’autres régions. Les femmes gagnent 62,8 % du revenu masculin et elles représentent 54,2 % des prestataires de la sécurité du revenu. La situation des femmes est très contrastée selon leur lieu de résidence. Les femmes habitant en zone rurale sont isolées, elles connaissent des difficultés de transport, surtout que, ces dernières années, des bureaux de l’aide juridique ont été regroupés autour de quelques centres administratifs.

Aide juridique en Montérégie

On compte 13 bureaux d’aide juridique répartis dans 6 districts judiciaires : Beauharnois (3), Bedford (2), Iberville (1), Longueuil (5), Richelieu (1), Saint-Hyacinthe (1). Selon la Corporation régionale d’aide juridique, qui les chapeaute, ils ont traité près de 30 000 demandes en 2000-2001, dont un tiers concernant le droit de la famille.

Près de 3 000 avocates et avocats de la pratique privée travaillaient à mandat dans le cadre de l’aide juridique au Québec en 2000-2001. Elles-ils seraient 947 en Montérégie. Les quatre personnes interrogées dans le cadre de l’étude traitent 50 à 300 dossiers en aide juridique par an, soit 40 % à 60 % du total de leurs dossiers. Leurs consoeurs et confrères des bureaux permanents de l’aide juridique comptent, pour leur part, 300 à 1000 dossiers actifs. Le droit matrimonial représente 75 % à 100 % de leur pratique. Les demandes concernent la pension alimentaire, la garde des enfants, la révision des droits d’accès. Le règlement des pensions alimentaires étant mieux encadré par la loi, c’est autour de la garde des enfants et du partage des frais de garde que tournent nombre de demandes.

Notons que les bénévoles d’Inform’Elle, qui répondent à quelque 4 000 demandes téléphoniques par an, confirment les données recueillies auprès des femmes interrogées.

L'aide juridique, un choix 
qui n'en est pas un
 

 

 


Les femmes qui recourent aux services de l’aide juridique ne le font pas par véritable choix, mais par contrainte économique, puisque l’aide juridique est accordée selon des barèmes de revenus. Certaines le font sous l’injonction de la sécurité du revenu, qui n’accorde du soutien au revenu que si la femme a demandé une pension alimentaire de son ex-conjoint (la pension alimentaire entre dans le calcul des revenus). Cette obligation a parfois précipité des démarches juridiques que les femmes ne se sentaient pas prêtes à entamer.

« On est comme pas assez pauvres

pour être pauvres et pas assez riches

pour être riches. » (une femme interrogée) 

Par ailleurs, bien que la loi laisse aux requérantes le choix de l’avocate ou de l’avocat à qui elles feront appel, dans la réalité, les femmes voient leur choix limité par plusieurs éléments :

-         manque de références de noms d’avocates ou d’avocats à consulter (plusieurs ont suivi les conseils de connaissances ou ont pris des noms au hasard dans l’annuaire téléphonique) ;

-         la mobilité : faute de pouvoir se déplacer facilement, des femmes font appel à une avocate ou un avocat habitant près de chez elles, où elles pourront se rendre à pied. Ceci explique, notamment, le recours à des cabinets de pratique privée plutôt qu’aux bureaux de l’aide juridique;

-         manque de connaissance de la loi : beaucoup ne savent pas que le système est mixte (voir plus loin L’aide juridique aujourd’hui). Certaines femmes ne connaissent même pas l’existence de l’aide juridique (ceci est surtout vrai des femmes peu scolarisées, des femmes immigrantes, des femmes autochtones qui ont un autre cadre de référence et manquent de soutien au sein de leurs propres communautés);

-         la complexité de leur dossier, qui peut rebuter certaines avocates et certains avocats du privé, qui les renvoient alors aux bureaux gouvernementaux.

La moitié des femmes rencontrées dans le cadre de cette recherche a changé d’avocate ou d’avocat en cours de traitement de dossier, car elles ne se sentaient pas suffisamment écoutées ou suivies.

Restaurer l'estime de soi
 

 


Le contact avec une avocate ou un avocat est souvent le premier que les femmes ont avec la justice. Elles le font dans une période de trouble profond, où elles sont fragiles, affectivement, moralement et matériellement. Pour certaines, il s’agit d’une démarche d’autonomie. Selon les avocates et les avocats qui ont échangé avec l’auteure de l’étude, environ 30 % des femmes les consultant dans le cadre d’un problème matrimonial sont des femmes au foyer, ayant peu ou pas travaillé, que la rupture plonge dans une situation financière difficile. Une bonne moitié est composée de jeunes femmes âgées de moins de 30 ans, monoparentales, vivant des problèmes de dépendance (alcool, toxicomanie), relevant souvent de la sécurité du revenu.

Les femmes sont inquiètes face à leur avenir, immédiat et à long terme. Elles sont intimidées face à la justice. La dépendance économique leur pèse. Beaucoup ont le sentiment que, si elles pouvaient payer une avocate ou un avocat, elles seraient mieux défendues. Cela leur procurerait de l’assurance, les renforcerait dans la légitimité de leurs exigences.

Des discussions effectuées avec les femmes, nous avons listé les besoins suivants. Ils sont juridiques et non juridiques.

Besoins juridiques

« La première des choses, le mot « avocat », « justice », c’était une peur pour moi, déjà. C’était une chose que je n’étais pas familière avec ça (…), la justice, ce qui va avec, être au courant des lois, non je n’avais jamais fait rien qui pouvait m’amener à avoir affaire à la justice, alors pour une personne comme moi j’avais besoin d’être beaucoup renseignée. »

Dans un premier temps, les femmes ont besoin d’information sur leurs droits, la procédure et ses étapes, les solutions envisagées, les conséquences de ces solutions, les délais d’attente, etc. Elles veulent aussi savoir si leur avocate ou leur avocat leur fournit les services auxquels elles ont droit et souhaitent, éventuellement, être préparées à se présenter devant le juge.

Elles réclament une grande disponibilité de leur avocate ou de leur avocat, qu’il-elle prenne le temps de les écouter, de répondre à leurs questions, d’éclaircir un point obscur. La rapidité avec laquelle leurs appels téléphoniques leur seront retournés est un critère important de satisfaction.

De même, elles exigent d’être prises au sérieux, surtout lorsqu’elles évoquent une situation de violence à leur encontre ou à l’encontre des enfants ou qu’elles réclament une expertise psychosociale (ce service est offert gratuitement dans le cadre de l’aide juridique). Il semble que beaucoup d’avocates et d’avocats ne saisissent pas bien toute la dimension qu’implique la violence conjugale, ne prenant pas à sa juste valeur les sentiments de peur et de stress dans lesquels sont plongées leurs clientes, leur besoin de s’appuyer sur une personne de confiance. Des femmes, menacées par leur ex-conjoint, craignent que leurs démarches empirent les choses.

La plupart des violences sont psychologiques et non physiques. Elles ne sont pas faciles à prouver, surtout si la femme n’a jamais porté plainte contre son ex-conjoint. « Moi, c’était un cas de violence conjugale et puis ma fille ne voulait pas aller chez son père, et c’est encore le cas. Mais j’ai senti qu’il n’embarquait pas dans mon histoire, il ne me croyait pas tu sais, il prenait ça à légère, même quand on passait en Cour, je voyais ça », raconte une femme.

Concrètement, les femmes veulent être guidées pour pouvoir faire des choix éclairés, tout en conservant la maîtrise de leur dossier.

« Elles ont peu de moyens, elles ne savent pas ce qu’elles vont avoir de l’autre partie, elles ont la charge d’enfants, de jeunes enfants, sans moyens financiers, il y a de quoi être un peu fatigué. » (D. avocat salarié)

Besoins non juridiques

Chaque histoire est une histoire particulière. Même si le traitement juridique se ressemble, chaque cause doit être entendue dans sa particularité. Les femmes ont besoin de se sentir écoutées, d’être rassurées, d’être encadrées pour « gérer leurs émotions ».

Elles ont aussi besoin de revaloriser l’estime d’elles-mêmes, écornée par la rupture, aggravée par le sentiment d’infériorité d’être dépendantes de l’aide juridique. « On est sur l’aide juridique, c’est une classe… », dit une femme. Une autre renchérit : « C’est que tout le monde nous parle « Vlang ! Vlang ! Vlang ! ». Tu es rien que rien, tu es rien qu’une assistée sociale, tu ne vaux pas grand-chose dans la vie. »

Comme elles affrontent, brusquement et simultanément, de nombreux problèmes, qui ne sont pas tous d’ordre juridique, elles ressentent la nécessité d’être orientées vers des services connexes, pour elles-mêmes et pour leurs enfants, pour pouvoir s’organiser, matériellement et émotionnellement, pour échanger (elles ressentent souvent une urgence à parler).

Besoins subjectifs

Ces besoins relèvent souvent de la perception qu’ont les femmes du travail effectué par leur avocate ou leur avocat. De cette perception découlera la confiance qu’elles lui porteront. Ainsi, elles ont besoin de sentir que l’avocate ou l’avocat connaît son affaire, qu’il-elle fonce, qu’il-elle assure le suivi du dossier, qu’il-elle fait le nécessaire pour écourter les délais, obtenir une négociation ou un jugement en Cour.

La détermination de l’avocate ou de l’avocat à défendre leurs intérêts avant tout, à camper fermement sur ses positions, son impartialité, son honnêteté et son équité, sa franchise, sa clarté dans ses explications, son absence de préjugés renforcent leur confiance. De même elles souhaitent que l’avocate ou l’avocat réponde à leurs requêtes et ne soit pas négligent dans les tâches qu’elle ou il doit légalement effectuer.

Beaucoup de femmes ne savent pas que les avocates et les avocats privilégient les règlements à l’amiable et ne souhaitent pas passer devant un juge, sauf, parfois, dans des cas de violence conjugale, où un jugement paraît plus contraignant. Une avocate témoigne : « Par exemple, si je représente la mère, et que le père lui fait des problèmes, il l’empêche de voir les enfants, ou il la dénigre devant ses enfants, elle se sent continuellement lésée dans ses droits et elle me dit qu’elle n’en peut plus… Ça c’est un dossier qui doit aller devant un juge. Si on est trop souple là-dessus et qu’on signe un consentement, ça ne règlera rien. »

Pour des raisons valides ou non, plusieurs femmes ont ainsi eu le sentiment d’accepter des compromis qu’elles ne souhaitaient pas faire : « Moi, je trouvais qu’elle ne me défendait pas là. Tu sais, c’était comme une combine entre eux… Cela n’a pas pris de temps, quand j’ai eu signé, sa valise était refermée puis elle était repartie. »

D’autres disent avoir « monté elles-mêmes leur dossier » ou se plaignent d’avoir été mal informées, mal suivies, mal défendues. « Elle est payée par l’aide juridique et c’est moi qu’il faut qui fasse les démarches ? », dit l’une.  « J’ai senti qu’il ne voulait pas s’investir, il ne voulait pas foncer, je voulais plus que lui », ajoute une autre. Ce désintéressement viendrait, toujours, de leur situation pécuniaire : «Moi, je me dis, quand tu n’as pas d’argent, ils ne sont pas trop là ! (…) Je me dis si je l’avais payé, peut-être qu’il aurait plus pris pour moi, qu’il m’aurait plus défendue… Comprends-tu, il aurait plus combattu ma cause. » 

Il en ressort une frustration, un sentiment que leur avocate ou avocat manque de compétence. Une enquête ontarienne de 1995, citée par le Conseil national du bien-être social, notait que les avocates et avocats acceptant des causes d’aide juridique sont moins compétents que d’autres. Les avocates et avocats qui s’expriment dans le cadre de notre étude contestent cette affirmation, mais elle explique que certaines femmes décident de transférer leur dossier à une autre avocate ou à un autre avocat. Le transfert peut s’avérer difficile à effectuer, des avocates ou avocats refusant de reprendre des dossiers entamés par d’autres.

« Si tu vas à l’aide juridique, c’est parce que tu n’as pas d’argent. Si j’en avais eu,  je n’aurais pas attendu deux ans, ça se serait réglé avec de l’argent bien plus vite que ça. Sauf que je n’en avais plus d’argent. Cela fait toute une différence. » (une femme interrogée)

 

Les avocats en question
 

 


Les relations avec les avocates et les avocats ne sont pas exemptes de difficultés. Les femmes expriment de l’insatisfaction face au service fourni. Elles ont le sentiment de ne pas être comprises ou informées comme elles le désirent et trouvent que les avocates et les avocats traitent un trop gros volume d’affaires, accordant ainsi trop peu de temps à chaque dossier. Elles pensent aussi que si elles pouvaient payer des honoraires, elles seraient mieux défendues.

Le cadre de notre enquête est trop étroit pour conclure à la véracité de ces critiques. Elles reposent à la fois sur des constats réels et sur des perceptions subjectives émises par les deux parties, comme nous l’avons déjà évoqué dans la partie précédente.

Constats objectifs

L’insuffisance du nombre d’avocates et avocats travaillant dans les bureaux d’aide juridique est réelle. En Montérégie, des bureaux ont été fermés et le nombre des salariées et salariés réduit, alourdissant la charge de travail. Il existe toutefois un choix d’avocates et d’avocats suffisant, qui ne devrait pas empêcher des femmes de recourir à l’aide juridique, ce qui n’est pas le cas dans toutes les régions de la province.

Le volume de dossiers traités réduit le temps que chaque spécialiste peut consacrer à l’étude d’un dossier. Les femmes se plaignent de rencontres brèves et peu nombreuses avec leur représentante ou représentant. Le volume d’affaires affecte aussi la disponibilité de l’avocate ou de l’avocat et peut allonger le temps de réponse à une question que la cliente pose. Des avocates et avocats disent ne pas compter leur temps; d’autres reconnaissent ne pas s’investir dans une cause comme elles-ils le souhaiteraient. « Elles sont un peu laissées à elles-mêmes », reconnaît une avocate salariée, « Quand je vous parlais du volume (…), c’est sûr que moi quand j’ai de la Cour, j’ai plusieurs dossiers (…) des fois je peux avoir 5, 10, 15 dossiers, alors je ne peux pas les accompagner tout le temps. »

Rémunération : fondements et idées reçues

Quel que soit le nombre de démarches à effectuer, le montant de la rémunération allouée par cause aux avocates et aux avocats agissant en pratique privée n’est pas très élevé et est inférieur de 40 % à 60 % à leurs honoraires habituels. Est-il toutefois un motif de refus de dossiers en aide juridique ? Les réponses à ces questions sont nuancées. Comme on l’a vu, les femmes ont l’impression que, si elles pouvaient payer, elles seraient mieux défendues.

Pour des avocates et avocats, la revalorisation de leurs honoraires, intervenue en juin 2001 est satisfaisante. Elles-ils souhaiteraient toutefois obtenir, soit un paiement horaire, soit des versements intermédiaires de leurs honoraires et la couverture des frais qu’elles-ils engagent en cours de procédure.

Le refus opposé par des avocates et des avocats à l’acceptation de dossiers de l’aide juridique porterait plutôt sur la clientèle, considérée comme « difficile » et qui ne cadre pas avec l’image de marque de leur cabinet.

Toutefois, avant d’accepter un dossier, plusieurs avouent prendre en compte le temps qu’il faudra y consacrer et évitent ainsi les dossiers qu’elles-ils jugent difficiles à gagner ou qui sont complexes. Il s’agit surtout de partage contesté des biens et de garde des enfants contestée. « Parce qu’on tombe dans les sentiments, dans l’irrationnel », dit un avocat. Une autre ajoute : « Parce que ces gens-là sont dans le besoin énorme, et je ne suis pas équipée moi… Parfois les comportements ne sont plus adéquats, plus rationnels, et moi je ne suis pas psy. Et de gérer ça, c’est épuisant. »  

« Ce sont des dossiers qui demandent beaucoup et on n’est pas payés pour ça (… ) Tout le temps où tu prépares ton dossier, que tu montes ta requête, ta documentation, le temps que tu passes avec ta cliente, tout ça n’est pas payé. Tu es payée pour le jugement »,  reconnaît une avocate à mandat.

Dans ce cas, il peut arriver que les avocates et avocats renvoient leur cliente vers des bureaux de l’aide juridique. Ou alors elles-ils y consacrent moins de temps qu’il ne faudrait ou précipitent une solution. En 2000, l’Association du Barreau canadien a confirmé cette tendance : soit les avocates et avocats refusent des dossiers de l’aide juridique « qui ne rapportent pas d’argent » ou y consacrent moins de temps et d’attention.

« On a les mains liées. On ne peut pas opérer comme dans un dossier où on a une cliente qui nous paie. » (A. avocate à mandat)

 

Cette attitude n’est pas générale. Plusieurs avocates et avocats estiment que les femmes relevant de l’aide juridique jouissent d’un meilleur traitement que les autres car elles peuvent obtenir, gratuitement, des services qui sont coûteux, comme les expertises psychosociales. Les avocates permanentes et les avocats permanents disposent d’aide technique, de services de recherche qui facilitent leur travail.

Perceptions subjectives

Plusieurs avocates et avocats ont évoqué la « lourdeur » des femmes faisant appel à l’aide juridique. Peu scolarisées, mal au courant de leurs droits, exigeant beaucoup d’explications, d’encadrement, émotives … toutes ces caractéristiques rendent, parfois, les relations difficiles. L’incompréhension est particulièrement vive lorsqu’il s’agit de violence conjugale, reconnaissent des avocates et des avocats. Des avocates et avocats jugent les femmes dépendantes des services et difficiles à responsabiliser. Une cliente qui s’informe, suit son dossier, se prend en charge et se rend compte du travail effectué, voilà l’idéal. Mais beaucoup de femmes, notent des avocats, prennent les services pour acquis et ont parfois des exigences difficiles à rencontrer, qu’ils qualifient « d’inutiles ». Les clientes n’ont pas conscience des coûts que représentent certains actes, comme le recours à une expertise psychosociale et la plupart souhaitent pouvoir les sensibiliser à cette question.

Ils avancent aussi la lourdeur administrative, l’absence de formation et de reconnaissance de leur travail.

Le tandem idéal

L’avocate ou l’avocat répondant le mieux aux besoins des femmes serait ainsi, non pas une femme ou un homme recevant de gros honoraires, mais une personne engagée, qui fasse preuve d’écoute, de compréhension et de qualités personnelles telles la patience, la persévérance, l’empathie à l’égard de leurs clientes.

Lesquelles seraient des femmes avisées de leurs droits, capables d’aller chercher l’information dont elles ont besoin avant d’entamer une démarche juridique. Lors de leur rencontre avec l’avocate ou l’avocat, elles lui fourniront toute l’information dont elle-il a besoin, lui poseront des questions détaillées, précises. Si nécessaire, elles se feront accompagner afin de se faire expliquer certaines notions, de ne pas se troubler, de ne pas se laisser submerger par leurs émotions et d’être crédibles aux yeux de l’avocate ou de l’avocat. Plusieurs femmes font appel à des ressources connexes : psychologiques, policières (DPJ, CLSC), groupes de femmes, maisons d’hébergement…

Une fois le dossier ouvert, il est souhaitable qu’elles en assurent le suivi, qu’elles y mettent de l’énergie, voire de la combativité. « Moi, je trouve qu’il faut que tu sois armée, il faut que tu sois prête à faire la guerre, il faut que tu connaisses tes droits et il faut que tu saches où tu vas », exprime une femme. Il faut aussi qu’elles fassent confiance à leur représentante ou représentant.

Faire mieux, faire plus et autrement
 

Les améliorations du système de l’aide juridique proposées par les différentes personnes rencontrées dans le cadre de cette recherche, se croisent, se rejoignent, s’amplifient. Elles visent à huiler la machine, à atténuer les tensions et à procurer une meilleure réponse aux besoins de celles qui sont tributaires de l’aide juridique.

Améliorations suggérées

Certaines améliorations sont communément suggérées, comme la nécessité de mieux informer les femmes. Les avocates et les avocats pourraient aller plus vite, être plus efficaces si leurs clientes connaissaient leurs droits avant de les consulter. Les femmes se sentiraient plus sûres d’elles, plus capables d’évaluer les conséquences des propositions que leur font les avocates et les avocats et plus à même de suivre le cheminement de leur dossier. A l’heure actuelle, seule une démarche volontaire (consultations d’organismes d’aide comme Inform’Elle, lectures) permet de combler ce besoin. Encore faut-il que les femmes sachent où aller chercher de l’information et puissent l’appliquer à leur situation personnelle.

Certaines propositions avancées par les femmes ne suscitent pas l’unanimité. Il en est ainsi du fait de confier tous les dossiers de l’aide juridique seulement aux avocates permanentes et aux avocats permanents. Des femmes estiment, au contraire, être mieux écoutées par des avocates et des avocats de la pratique privée agissant à mandat car « s’il accepte le mandat, c’est qu’il accepte la cause, il accepte d’être payé moindre, il est capable de se battre en fonction de toi et de tes besoins. »

Revendications générales concernant l’aide juridique et les droits :

1.     qu’il existe un service renseignant sur l’accès à l’aide juridique et sur les droits des femmes, consultable sans rendez-vous, pour répondre aux questions préalables que les femmes se posent avant d’entamer une démarche juridique;

2.     qu’il existe un service émettant les mandats, qui soit accessible sans rendez-vous;

3.     que l’émission des mandats puisse s’effectuer à distance;

4.     que les critères d’admissibilité financière soient revus à la hausse;

5.     que le calcul des critères d’admissibilité soit simplifié et clarifié de telle sorte que l’admissibilité puisse être facilement comprise et évaluée par la personne requérante;

6.     que le montant du volet contributif soit diminué;

7.     qu’il soit désigné une avocate ou un avocat à la représentation des enfants qui sont impliqués dans un litige entre les parents, surtout s’il y a violence;

8.     que des ressources suffisantes soient allouées aux groupes communautaires qui fournissent de l’information et qui apportent un service complémentaire à celui des services gouvernementaux;

9.     que les femmes soient référées, si nécessaire, à des services complémentaires : travailleuses sociales et travailleurs sociaux, personnel de santé, services d’aide matérielle, etc.;

10.  que toutes les professionnelles et tous les professionnels agissant en matière du droit de la famille reçoivent des formations afin de mieux détecter et comprendre la violence familiale et conjugale;

11.  que les femmes qui quittent leur conjoint et se retrouvent, de ce fait, sans ressources, puissent percevoir, pendant une période transitoire de six mois, des prestations de sécurité du revenu, le temps de se réorganiser;

12.  que les services de médiation soient gratuits pour les couples sans enfants admis à l’aide juridique;

13.  que des dépliants qui expliquent les grandes lignes de la loi et les procédures soient largement diffusés;

14.  que des organismes comme Inform'Elle offrent des services décentralisés, des conférences, ateliers dans différents milieux.

Plus spécifiquement, les femmes demandent :

1.     que les avocates et avocats, quel que soit le régime qui les régit, perçoivent des honoraires plus élevés afin de leur offrir un service adéquat et complet;

2.     que chacun traite moins de dossiers, se rendant ainsi plus disponible pour chaque cas suivi;

3.     que les femmes sachent les services que peut et que doit rendre une avocate ou un avocat;

4.     qu’il y ait des recours possibles contre les avocates et les avocats quand elles ne sont pas satisfaites de leurs services;

5.     que soit dressée une liste des avocates et des avocats avec leur expertise et leur expérience, afin de faciliter le choix de celle ou celui à qui elles s’adresseront;

6.     que les avocates et les avocats prennent conscience des difficultés que vit la clientèle féminine de l’aide juridique, particulièrement des questions relatives à la violence conjugale;

7.     que les avocates et les avocats agissant dans le cadre de l’aide juridique traitent toutes les personnes de la même façon, sans préjugés ni jugements de valeur, de la même manière que sont traitées les clientes qui peuvent payer;

8.     que les avocates et les avocats fassent preuve d’empathie, de chaleur humaine à l’égard de leurs clientes.

Plus spécifiquement, les avocates et avocats demandent :

1.     que la pratique de l’aide juridique soit valorisée;

2.     que les avocates et les avocats de la pratique privée puissent facturer des honoraires intermédiaires avant la fin du mandat;

3.     que les avocates et les avocats de la pratique privée soient payés sur une base horaire plutôt qu’au forfait;

4.     que les frais engagés par les avocates et les avocats de la pratique privée soient remboursés dès qu’ils ont été émis;

5.     que les avocates et les avocats de la pratique privée disposent de moyens techniques similaires à ceux des bureaux de l’aide juridique;

6.     que le traitement des dossiers de l’aide juridique soit allégé de façon à être moins bureaucratique et moins compartimenté;

7.     que les effectifs des avocates salariées et des avocats salariés soient augmentés;

8.     que le nombre de dossiers qui leur sont confiés soit diminué;

9.     qu’il y ait une sensibilisation des bénéficiaires de l’aide juridique au coût des actes de l’aide juridique;

10.  que les femmes soient informées sur leurs droits préalablement à toute démarche juridique, afin de pouvoir poser des questions précises, détaillées et éclairées lors des entrevues avec les avocates et les avocats;

11.  que les femmes soient responsabilisées à suivre leur dossier, à le défendre, afin d’apprécier le travail réalisé par celles et ceux qui les défendent.

D’autres propositions peuvent être ajoutées :

1.      que la pension alimentaire soit exclue des revenus considérés pour l’admissibilité à l’aide juridique;

2.      que chaque bureau d’aide juridique soit doté d’un service d’information sur l’aide juridique, les droits des femmes en matière matrimoniale, les services juridiques et non juridiques disponibles, facilement accessible (en personne, sans rendez-vous, par téléphone);

3.      que les bureaux d’aide juridique assurent des services de prévention et d’éducation (formation, ateliers, conférences, échange d’information) en partenariat avec les organismes communautaires;

4.      que les femmes ayant trouvé refuge dans une maison d’hébergement disposent d’un délai avant d’entamer les démarches de demandes de pension alimentaire exigées par la sécurité du revenu;

5.      que les délais de règlement des contentieux en matière familiale soient accélérés;

6.      que le ministère de la Justice recueille et publie des données sexo-spécifiques sur l’utilisation des services d’aide juridique en matière matrimoniale;

7.      que le ministère de la Justice réalise une étude comparative entre les services offerts par les avocates et les avocats relevant des bureaux d’aide juridique et celles et ceux exerçant à titre privé, afin d’ajuster les services, les honoraires, le traitement des dossiers, si nécessaire;

8.      que les besoins particuliers de la clientèle féminine de l’aide juridique soient pris en compte à tous les stades de la réforme de l’aide juridique.


En un mot comme en cent
 

 

 


Que le système actuel de l’aide juridique soit inadapté aux besoins des femmes qui y font appel dans le cadre du droit matrimonial semble évident. Il ne prend en effet pas en compte toute la réalité que vivent les femmes, particulièrement lorsqu’il y a violence conjugale.

Refuser une justice à deux vitesses

Alors que les difficultés économiques sociales s’accroissent, des bureaux d’aide juridique ont été fermés ces dernières années au Québec. Le volume d’affaires incombant à chaque avocate ou avocat est en augmentation, mettant en péril la qualité des prestations que ceux-ci accordent à leurs clientes : qualité d’écoute, d’encadrement, de suivi du dossier… Les ressources complémentaires fournies par les organismes communautaires apparaissent de plus en plus indispensables, pour ne pas dire essentielles. Or, les financements gouvernementaux qui leur sont alloués ne cessent de diminuer.

Au bout de trente ans d’existence, l’aide juridique a besoin d’être repensée pour mieux répondre aux besoins des femmes. C’est ce que nous avons tenté de faire à travers notre étude, et que nous tenterons de faire, avec des partenaires, dans les mois à venir, afin d’améliorer le système et de bonifier notre mission. Afin de dégager les grandes lignes et de faire adopter les ajustements nécessaires pour que l’aide juridique soit un véritable service équitable et égalitaire, et que la justice n’apparaisse pas comme un service « à deux vitesses », où les personnes démunies seraient moins bien traitées que celles ayant des moyens financiers plus importants. Pour que l’engagement de créer une société où ne règne aucune discrimination, particulièrement suite à des situations de pauvreté, ne soit pas un simple vœu politique, mais une réalité concrète et tangible.

Nous constatons que les femmes ont besoin :

·        d’information : sur l’aide juridique (son fonctionnement, les critères d’admissibilité) ; sur leurs droits : quels sont-ils, comment les faire valoir, comment se déroule une procédure en justice, les conséquences de leurs choix pour elles-mêmes et pour leurs enfants si elles en ont;

·        d’une meilleure accessibilité et d’une meilleure représentation

·        d’être écoutées, rassurées, respectées et soutenues dans leurs démarches, dans leurs choix et leurs particularités;

·        de compréhension, surtout quand elles ont à faire face à des problèmes de violence conjugale. Toutes ces attitudes doivent les aider à avoir confiance en leur avocate ou leur avocat et à restaurer l’estime qu’elles ont d’elles-mêmes;

·        de ressources complémentaires, car leurs problèmes ne sont pas que juridiques. Ils sont sociaux, psychologiques, matériels, etc.

Les commentaires que nous avons recueillis auprès des femmes montrent qu’elles sont satisfaites si l’avocate ou l’avocat les informe et les représente correctement, si elle ou il se montre professionnellement compétent, disponible, sûr de soi et respectueux de leurs choix. Il faut aller résolument vers ses avenues.

Principales revendications

pour une réforme de l’aide juridique

·        mieux faire connaître le système de l’aide juridique ;

·        multiplier les points d’information sur les droits juridiques en matière matrimoniale ;

·        augmenter le nombre d’avocates et d’avocats travaillant dans les bureaux d’aide juridique ;

·        diminuer leur volume d’affaires ;

·        rehausser les critères financiers d’accessibilité et diminuer le montant contributif ;

·        revaloriser les honoraires des avocates et avocats privés intervenant à mandat ;

·        assurer l’accès à des ressources complémentaires non juridiques ;

·        que toutes les professionnelles et tous les professionnels intervenant dans le cadre de l’aide juridique reçoivent une formation qui les sensibilise à la violence conjugale, selon une approche féministe et en lien avec les maisons d’hébergement reconnues pour leur expertise en la matière.

 

L’aide juridique aujourd’hui

La Loi sur l’aide juridique date de 1972 et a été revue en 1996. De compétence provinciale, elle couvre presque toutes les matières, civiles, criminelles et pénales.

Admissibilité

L’aide juridique (AJ) est octroyée aux personnes disposant de faibles revenus (8870 $ annuels pour une personne seule à 17500$ pour des conjoints et deux enfants ou plus). En matière de divorce, de garde d’enfant ou de pension alimentaire, l’on ne prend en compte que les sommes dont dispose la personne requérante : revenus, biens, liquidités. La pension alimentaire est incluse dans le revenu. Si l’aide est refusée et que la somme obtenue est inférieure aux frais engagés par les avocats, la personne peut solliciter l’aide juridique rétroactivement. Si la personne est admissible, elle aura accès aux services gratuitement ou moyennant une contribution. Selon la Commission des services juridiques, qui gère le régime d’aide juridique, 35 % à 42 % des personnes admissibles au volet contributif ne peuvent pas payer le montant demandé. Il est possible de faire appel de la décision de refus de l’aide.

La demande doit être déposée au bureau d’aide juridique le plus proche de sa résidence.

Droit de la famille

Tout le champ du droit de la famille est complètement couvert. En 2000-2001, les bureaux québécois de l’aide juridique ont traité 59 381 dossiers en matière familiale, soit 28 % du total des demandes. Les femmes représentent 70,5 % des personnes qui leur font appel.

 

Un système mixte

Deux catégories d’avocates et d’avocats travaillent dans le cadre de l’AJ :

·  les permanentes et les permanents des bureaux de l’aide juridique, qui reçoivent leur salaire du gouvernement. Quelque 358 avocates et avocats participaient au régime de l’aide juridique au Québec, en 2000, affichant un volume d’affaires moyen per capita de 500 dossiers par an. L’on compte 11 centres régionaux dans la province, responsables eux-mêmes de 111 bureaux et de 2 centres locaux d’aide juridique.

·  les avocates et avocats exerçant à titre privé, sous forme de mandat avec l’État. Leur nombre (près de 3 000 en 2000-2001) représente 18 % des personnes inscrites au Barreau. Les honoraires sont forfaitaires selon l’acte et sont payés au moment du jugement. Ils ont été revalorisés en juin 2000.

Le choix de l’avocate ou de l’avocat est libre. A tout moment, en cours de procédure, la requérante ou le requérant peut changer d’avocate ou d’avocat.

Ce document est une synthèse du Rapport de recherche L’accès des femmes à l’aide juridique en matière matrimoniale sur le territoire de la Montérégie. L’expérience des femmes, le point de vue des avocats (№ ISBN 2-9807657-0-8), rédigé par Nathalie Riopel.

Rédaction, contact : Brigitte Verdière

                            Chargée de projet

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3757, Mackay, Saint-Hubert, Québec, J4T 2P6

Tel : (450) 443-3442

droitpourelle@informelle.osbl.ca

La recherche a été financée par le Programme de promotion de la femme de Condition féminine Canada.

         ISBN 2-9807657-1-6

Dépôt légal – Bibliothèque nationale du Québec, 1er trimestre 2003

Dépôt légal – Bibliothèque nationale du Canada, 1er trimestre 2003

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